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Rev. Meta. – T. XXIX (n° 3, 1922). j g

LA PHILOSOPHIE D’EMILE BOUTROUX

Dès avant sa fondation, notre Revue avait contracté envers Emile Boutroux une dette, qui depuis n’a cessé de s’accroître par la collaboration généreuse que Boutroux lui a donnée pendant près de trente ans. En particulier, il avait consenti, sur la demande de M. Xavier Léon, à parler ici des penseurs qu’il avait personnellement connus et aimés, de Félix Ravaisson, de William James, de Jules Lachelier. Et la perfection même avec laquelle il avait rempli cette tâche apparaît aujourd’hui comme bien faite pour intimider, presque pour décourager, l’effort que nous allons tenter afin de reconstituer, dans ses grandes lignes, la carrière philosophique de Boutroux.


LA PHILOSOPHIE DE L’HISTOIRE ET L’HISTOIRE A l’École Normale, où il était entré en 1865, il eut pour maître Jules Lachelier, que, l’année précédente, Victor Duruy avait appelé à y enseigner. La première impression que produisaient les leçons de Lachelier, c’était une profonde stupéfaction. On était accoutumé à des doctrines « imposées par l’autorité et présentées comme une sorte de philosophie d’État destinée à servir des fins politiques et sociales». Lachelier disait « qu’il ne savait pas, qu’il cherchait ». Le progrès de la recherche l’amenait à suivre les replis de l’être intérieur, à travers les trois plans de vie que le génie méditatif d’un Biran avait explorés. Pour relier ces plans l’un à l’autre, pour assurer et pour justifier l’ascension de l’homme à la spiritualité