Page:Revue de métaphysique et de morale, numéro 3, 1911.djvu/38

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sont réellement, cela même est la preuve du caractère de liberté que nous avons reconnu dans l'amour. L'amour va toujours à la perfection et vient toujours de la liberté. Si l'amour était déterminé par le spectacle de la perfection réalisée dans les objets, on ne pourrait pas dire qu'il vient de la liberté, et, à vrai dire, il ne s'adresserait pas, à proprement parler, à la perfection, puisque la perfection réalisée, déterminée, déjà faite, et incapable par suite d'être autre chose que ce qu'elle est, n'est pas la perfection véritable. Il n’y a perfection que dans l'action même qui réalise progressivement la perfection. Autrement dit, c'est dans l'affirmation de l'aptitude à réaliser la perfection, dans l'affirmation du caractère absolu de la causalité de l'être dont l'amour fait son objet, que consiste la plus parfaite manifestation de la liberté dans l'amour. « Un amour qui serait enchaîné d’avance à n'aimer que la perfection déterminée, réalisée, qui serait incapable de dégager dans l'être aimé, l'aptitude latente, qui est le fond même de cet être, à réaliser progressivement la perfection, ne serait pas un amour véritable. » Nous avons tenu à citer, pour leur beauté et leur valeur propres, d'importants fragments de cette admirable analyse de l’amour. Si nous résumons les analyses précédentes, nous trouvons donc que l’objet de la sensibilité c'est le bonheur ; que l'acte essentiel de l'intelligence, c'est l'affirmation d'une mesure absolue du vrai, du beau, du bien ; que l'acte propre de la volonté c'est l'acte d'amour ; et que, bonheur, certitude, amour, sont autant de formes de la pensée, où se trouve affirmée la croyance à la réalité du parfait. Mais si notre nature pose spontanément, dans tous ses actes, la réalité du parfait, elle ne la démontre pas. Il ne suffit pas de souhaiter quelque chose pour en établir la réalité. Rien ne prouve que la réalité soit faite pour satisfaire aux exigences de notre être. Il resterait à se demander ce que peut être la réalité de cette nature dont on met en doute qu'elle doit satisfaire nos espérances, avant d'affirmer la réalité de l'être parfait. Il faudrait aussi savoir en quoi consiste la perfection pour être en droit de l'affirmer. Cet argument peut donc nous fournir des raisons de croire, non des preuves proprement dites. Si nous arrivons à prouver que Dieu existe, nous trouverons, dans la connaissance de nous-même, des raisons qui ne pourront que corroborer cette preuve ; mais elles sont insuffisantes à elles seules à la constituer.. Il en est de même de l'argument du consentement universel. Cet