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UNE PHASE DU DÉVELOPPEMENT

DE LA PENSÉE MATHÉMATIQUE

Nous imaginons qu’un armateur établisse une ligne de navigation il a fait construire des navires, il entretient des stations dans les ports. Si le rendement de l’exploitation est insuffisant, il sera obligé de liquider. Mais il arrivera peut-être qu’une société se constituera pour racheter, à des conditions très avantageuses, son matériel et son installation ; faisantainsi l’économie d’une portion importante du capital, elle sera en état de réaliser des bénéfices, là où la première entreprise avait échoué. Du bilan de la compagnie nouvelle il ressortira que l’affaire est financièrement satisfaisante. Mais il est clair que ce bilan financier ne correspond nullement à la réalité intégrale des faits ; si on se contentait de le consulter, on se ferait l’idée la plus fausse du véritable caractère de l’entreprise. Pour avoir l’intelligence de ce qui s’est effectivement passé., il est nécessaire de compléter le bilan financier de la seconde compagnie par l’histoire de la première entreprise, de porter en compte les sommes dont la perte a été supportée par les fondateurs de la ligne, dont l’économie a permis de substituer les bénéfices aux déficits ; il faut en définitive rétablir l’estimation de toutes les forces qui ont été mises en jeu, et qui n’ont, à aucun moment, cessé d’exercer leur influence.

Nous avons recours à cet exemple pour définir brièvement la situation de la critique philosophique vis-à-vis de la science telle qu’elle est exposée dans les traités systématiques de mathématique ou de physique. Ces exposés sont dominés par le principe auquel Mach a donné le nom d’économie de la pensée. Le principe a un sens vague ; il s’applique à la fonction économisante de la pensée, on montre que la possession d’une formule synthétique et générale dispense de refaire les calculs particuliers. Mais il a aussi un sens précis, que nous avons à retenir ici, et alors il s’applique à la