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Î55Q REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

peut se constituer sou objet est fixé par la ’définition des actions et des agents.

Si la morale a pour objets des actions et des agents, ses lois énoncent les rapports de ces agents et de ces actions. Dans une science déductive, les rapports entre les objets doivent être réglés par les lois de la raison de même que les axiomes mathématiques, les « axiomes moraux » dérivent donc des principes rationnels. Il ne suffit pas, en effet, pour ériger en axiome un jugement moral, de constater son évidence l’évidence n’est pas le critérium du nécessaire. Une proposition nécessaire peut n’être pas évidente si sa formule est obscure, et réciproquement une proposition évidente n’est pas un axiome tant qu’on ne l’a pas déduite du principe d’identité. Si Kant, comme l’indique M.’Boutroux i, a voulu fonder la morale sur l’axicme « Fais ce que dois », il a eu le double tort de s’appuyer sur un jugement dépourvu d’évidence, et sur un jugement irréductible aux principes rationnels. De même, les « axiomes ’s moraux » de Malebranche, de Cousin et de M. Janet 2, qui établissent des rapports de hiérarchie entre les êtres, ne sont pas de vrais axiomes parce qu’ils ne dérivent pas d’un principe de la raison l’axiome moral doit être, comme tout axiome, un corollaire de la loi d’identité.

Pour trouver cet axiome, ne suffira-t-il pas d’appliquer le principe d’identité aux objets de la morale, à l’action et à l’agent ? Dans la formule « A est A », remplaçons A par le terme « action » « une action est une action » ; « une action est identique à elle-même ». Et de même « un agent est identique à lui-même ». D’où l’on tire les négatives « Une action ’n’est pas identique à une autre action, ni un agent à un autre agent. » En remarquant que les actions se déroulent dans le temps, on peut déduire des conséquences nouvelles de l’axiome d’identité projeté dans la durée, cet axiome donne naissance au principe de l’uniformité des séquences si A est A, et que A soit précédé de B, suivi de C, A est précédé de B et suivi de C ; et, d’autre part, non-A n’est ni précédé de B ni suivi de C. Appliqué aux actions, ce nouveau principe donne « Une action identique a un antécédent identique et un conséquent iden1. Questions de monde et d’éducation, p. 39.

. La Morale, p. 59.