Page:Revue de métaphysique et de morale, 1897.djvu/443

Cette page n’a pas encore été corrigée

G. MILHAUD. – UNE CONDITION DU PROGRÈS. SCIENTIFIQUE. 439 conduit à apercevoir un second motif distinct, en vertu duquel il nous est interdit, vu la faiblesse de notre intelligence, de faire rentrer l’étude des phénomènes les plus compliqués dans le domaine des applications de l’analyse mathématique. En effet, indépendamment de ce que, dans les phénomènes les plus spéciaux, les résultats effectifs sont tellement variables que nous ne pouvons pas même y saisir des valeurs fixes, il suit de la complication des cas que, quand même nous pourrions connaître un jour la loi mathématique à laquelle est soumis chaque agent pris à part, la combinaison d’un aussi grand nombre de conditions rendrait le problème mathématique correspondant tellement supérieur à nos faibles moyens que la question resterait le plus souvent insoluble. Ce n’est donc pas ainsi qu’on peut faire une étude réelle et féconde de la majeure partie des phénomènes naturels » Ce passage, plus que tout autre, a de quoi surprendre par la nature des arguments présentés leur insuffisance montre surtout la conviction profonde où est Auguste Comte que de toutes parts la science rationnelle aura bien de la peine à franchir les limites atteintes.

Qu’on lise encore ces réflexions sur l’étude des astres-2 « Nous concevons la possibilité de déterminer leurs formes, leurs distances, leurs grandeurs et leurs mouvements ; tandis que nous ne saurions jamais étudier par aucun moyen leur composition chimique ou leur structure minéralogique, et, à plus forte raisonf la nature des corps organisés qui vivent à leur surface, etc. En un mot, pour employer immédiatement les expressions scientifiques les plus précises, nos connaissances positives par rapport aux astres sont nécessairement limitées à leurs seuls phénomènes géométriques et mécaniques, sans pouvoir nullement embrasser les autres recherches physiques, chimiques, physiologiques, etc. »

Il faudrait à chaque instant s’arrêter, dans lalecture d’Àug. Comte, si l’on voulait recueillir tous les passages où il assigne, à propos de tel ou tel problème, les limites de ce que peut atteindre l’intelligence humaine, si elle ne veut pas produire de chimériques fictions. Citons ° encore l’insistance avec laquelle il demande aux physiciens de se méfier des mathématiciens purs qui leur feraient perdre de vue les conditions de positivité indispensables pour l’objet de leur science ; qui pourraient, par exemple, les entraîner à appliquer la méca-Cours de phil, positive, leçon III. ̃

. Ibid., leçon XIX.