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290 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

jamais dans l’antécédent qu’une seule cause, et cette cause est toujours suffisante. D’ailleurs qu’importe. la distinction d’avec les causes particulières, si le fait ne diffère point de leur totalité ? On répond qu’il en diffère pourtant par la concentration de sa nature, par sa propre unité. Mais cette concentration, cette unité, ou bien ne sont rien du tout, ou bien doivent, d’après l’hypothèse, être préparées par ce qui coexiste ou qui précède, en d’autres termes doivent se trouver déjà dans la totalité des causes, et ainsi cette différence s’évanouit comme l’autre. Serait-ce donc la rencontre elle-même des causes qui marquerait une distinction d’avec les antécédents et les coexistants ? Mais la question n’est que reculée. Cette rencontre, pour ne fournir rien d’incoordonné, doit avoir elle-même sa raison d’être, doit être contenue dans l’état de choses précédent ou coexistant, et ainsi de suite. Donc, encore point de distinction assurée. Resterait-il au moins celle de situation dans l’espace ou dans le temps ? Mais si tout est identique, tout doit être immobile, tout doit être à la même place. Pourquoi le même serait-il situé différemment ? L’unité de Parménide, voilà la conséquence logique de la suppression de l’élément indéterminé. Dès lors, comment procéder à la coordination causale, laquelle suppose nécessairement la dualité de la cause et de l’effet ? Comment procéder a un rapprochement dialectique quelconque ?

Qu’on insiste pour qu’il n’y ait pas de fait sans cause, on 

aura raison ; mais cela ne peut être compréhensible qu’à une condition, c’est que, dans le terme cause, il y ait quelque chose qui ne se retrouve pas dans le terme effet, et, réciproquement, qu’il y ait dans le terme effet quelque chose qui n’ait pas existé dans le terme cause ; bref, que l’on veuille reconnaître dans l’un et l’autre termes un élément incoordonnable. Or cet incoordonnable du dedans n’est pas d’une autre nature que l’incoordonnable du dehors. Si nous acceptons l’un, il n’y a pas de raison pour repousser l’autre. Ou bien ils ne sont ni l’un ni l’autre inhérents à la réalité, ou bien ils le sont tous les deux.

Il n’en faut pas davantage pour maintenir la signification que nous avons donnée dès l’abord à la dialectique générale, et, en conséquence, pour assurer un objet réel à la religion. Toutefois, on pourrait craindre encore que cet objet n’eût pas assez de valeur en lui-même pour justifier la formation d’une nouvelle dialectique. Sans doute, il vaut par cela seul qu’il est. En outre, il représente dans la réalité l’élément le plus en relief. C’est la différence, c’est