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objet de jugement, les êtres réels, les choses, aussi bien que les êtres purement conceptuels et les idées de la raison. Les notions, sous le rapport do l’abstraction, forment une sorte de hiérarchie, depuis l’idée singulière et concrète dénotée par un nom propre, jusqu’aux concepts les plus extensifs, et la différenciation des termes de cette série provient du degré variable, de liberté ou de dépendance où se trouve, dans chaque cas, l’idéation et la mémoire intellectuelle à l’égard de la perception.et de la mémoire sensible. Ce que nous appelons réel, dans le domaine de l’entendement, correspond aux idées dont le contenu est directement subordonné aux hasards de la perception. Ma maison, mes amis, mon chien, les arbres du jardin, idées singulières, mais idées, de même que le bonheur, la volonté, la vertu ; idées inaltérables dans leur forme d’existence logique, une fois posées, mais dont le contenu change au jour le jour au gré de mes perceptions. Un édifice, un homme, un quadrupède, un arbre, idées communes, dont la matière est moins souple, moins plastique et plus durable, que la perception seule modifie à peine et qui ne changent guère que par l’effet des changements apportés à une masse considérable d’idées singulières et particulières, plus immédiatement soumises à la sensibilité. Les corps, la force, l’action, la cause, idées générales et abstraites, qui résument une infinité d’expériences où la perception n’est déjà plus engagée que d’une manière très indirecte et n’exerce qu’une influence très, lointaine, qui ne changent que lentement, au cours des siècles, et dont le contenu ne s’enrichit et ne se diversifie que par l’apport d’idées dont l’élaboration demande l’effort successif de plusieurs générations.

Toutes ces réalités mentales se ressemblent par un point ; toutes ont la forme indéniable de l’être ; toutes manifestent l’activité d’une même fonction, la fonction logique, la signification par l’entremise

du nom.

Les idées sont des habitudes, et, ajoute-t-on, des habitudes dans l’ordre intellectuel. Nous comprenons maintenant ce qu’est, psychologiquement, « l’ordre intellectuel ». C’est une qualification particulière de faits psychologiques non sensibles l’ordre intellectuel est l’ordre de l’existence logique.

La réalité psychologique, à savoir la diversité qualitative des phénomènes de conscience, comprend, par suite, infiniment plus de variétés que la réalité affirmée par l’entendement, la réalité pensée.