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L. WEBER. IDÉES CONCRÈTES ET IMAGES SENSIBLES. 48 templation desquelles le sujet se sent affecté suivant un mode purement organique et vivant. Nous vivons nos impressions et nos souvenirs d’impressions, nous ne les pensons pas. Tant que de nos perceptions une notion n’a pas ; surgi, elles demeurent, même complètement objectivées, une partie de nous-mêmes, un fantôme ou qui nous commande ou qui nous obéit, sur lequel volitions et désirs se réalisent victorieux ou s’évanouissent impuissants, mais un fantôme que nous traînons avec nous, qui vit notre vie, naît et meurt avec-nous. Tout autre est l’idée, qui nous sert à communiquer avec autrui, c’est-à-dire à vivre une vie universalisée et prolongée au delà de nous, hors du temps et de. l’espace, dont :1e sujet ne se délivre jamais. L’objet qu’elle signifie par l’entremise du terme verbal acquiert une réalité dont la condition, quoique subordonnée à la conservation d’une habitude et à l’organisation définitive d’un faisceau de rapports une idée n’est qu’autant que nous la comprenons ne dépend plus des états de conscience déterminés et présents qui forment la trame sensible de la vie mentale. L’extériorisation est alors devenue si complète qui l’objet se transporte en dehors des cadres où s’enfermait toute perception. L’objet n’est plus fixé à aucun moment de la durée, et n’occupe aucun lieu de l’espace. Il existe à l’insu de ces conditions ; il existe logiquement. Nous l’affirmons comme vrai ou nous le nions comme faux ; mais soit que nous l’affirmions, soit que nous le niions, nous le pensons, et le penser -c’est l’identifier à lui-même, c’est, lui assurer ainsi une immuabilité auprès de laquelle la continuité où nous nous sentons vivre et qui est comme la basse profonde sur qui modulent incessamment les harmonies de nos sensations n’est qu’une série hétérogène et brisée à chaque pas.

Il ne faut pas confondre le sentiment du monde extérieur, et le sens organique du moi, qui en est le corrélatif, avec l’idée du monde extérieur et celle du moi, qui naît en même temps. Les .premiers, la plupart des animaux pourvus d’organes de, relation différenciés lés possèdent à quelque degré et les discernent plus ou moins nettement, et, à mesure que la perception se perfectionne, que la mémoire des images s’enrichit et se diversifie, l’objectivation gagne en précision et en étendue. La perception fournit aussi, en une certaine mesure, une vague appréhension de l’identité des objets et de leur permanence, car. la perception compare les impressions actuelles aux impressions passées’et implique le sentiment de la