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REVUE DE GÉOGRAPHIE

grandes avenues qui traversent Pékin du nord au sud, bordées de maisons dont le minuscule relief jure avec la largeur de la voie publique ; entre les rues principales, des ruelles étroites, tracées irrégulièrement. Les portes d’entrée des maisons sont si basses qu’on doit se plier en deux pour pénétrer dans l’intérieur.

Les chaises à porteurs, les chevaux qui circulent sans cesse dans les rues sont également plus petits que partout ailleurs. Jamais un Chinois, ou même un Japonais, ne pourrait se nicher dans ces boîtes étroites que le Coréen, un peu plus fort que ses voisins de l’est ou de l’ouest, utilise cependant comme moyen de transport : il faut s’y placer en serpent. Il n’existe aucune voiture dans le pays ; à part les quelques pousse-pousse de la capitale, ce n’est que dans les ports à traités que l’on apercevra quelques chariots et charrettes à bras introduits par les étrangers. Tous les fardeaux sont transportés soit à dos d’homme ou de cheval, soit à dos de taureau dont la puissante taille contraste avec la petitesse de la race chevaline. On voit souvent des enfants, même au-dessous de dix ans, porter des charges volumineuses sous lesquelles ils disparaissent complètement. Les hottes, de forme triangulaire couvrent toute la longueur du dos et sont terminées par deux supports permettant aux porteurs de se reposer sans avoir besoin de décharger ou de déboucler.

Il faut se promener de longues heures dans la ville pour rencontrer un Européen ; l’élément étranger n’y est encore que très peu représenté et ne comprend que le personnel des légations, les quelques fonctionnaires européens au service du gouvernement et des missionnaires.

La circulation indigène est par contre très active et offre de pittoresques tableaux. Les Coréens sont enveloppés de la tête aux pieds dans de larges vêtements blancs et portent des chapeaux pointus tissés en crins de cheval. Les femmes ont le visage soigneusement voilé à la mode musulmane et dissimulent leurs formes sous de larges habits : leurs jambes, déjà cachées par des caleçons longs et étroits, disparaissent dans de larges pantalons serrés à la cheville et sous une longue redingote analogue à l’habit sac des femmes persanes. Cet accoutrement féminin est complété dans la rue par un grand manteau vert dont les manches largement flottantes vont se réunir au-dessus de la tête, enveloppant le visage et les épaules d’un nuage mystérieux. Détail curieux, la poitrine est la seule partie du corps qui ne soit pas dissimulée.

La Corée a conservé plus encore que la Chine son cachet d’antiquité ; elle nous apparaît aujourd’hui telle qu’elle était avant l’ère mandchoue. Les vêtements que le peuple porte actuellement sont identiques en tous points à ceux qui étaient portés dans les premiers temps de l’histoire nationale. L’antique couvent de Seukwangsa, caché dans les magnifiques forêts de l’Ham-Kieng-to, possède, entre autres reliques, les habits