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retrouvé ce que la naissance et la vie périssable nous ôtent, et ce sont ces vérités trouvées que les hommes osent appeler célestes inventions, oubliant que toute vertu et toute science n’est qu’une réminiscence de la vie première et de l’existence inaltérable.

» Pour moi, je puis le dire, j’ai passé ma vie entière à supplier le Dieu souverain et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, de diriger par des inspirations intimes le cours difficile de ma vie et, souvent, j’ai reçu de lui des visions qui ne m’ont laissé aucun doute sur l’existence des divinités secondaires qui président à nos destinées. Le monde dans son ensemble n’est autre chose qu’un Être animé formé d’âme et d’intelligence ; mais, entre Dieu et lui, un autre Être intermédiaire préside à nos destinées, c’est le Soleil-Roi que j’adorai dès mes premiers ans et dont mes yeux ne pouvaient se détacher. Sa présence est notre vie, son absence notre mort ; sa nature est simple, pure et sans mélange[1] ; il provient d’un seul Dieu, du Dieu créateur, qui est le monde intelligent, et il est le milieu des êtres intellectuels intermédiaires, destiné à les présider, et propre à réunir les deux extrémités de la vaste chaîne par sa qualité conciliante et amie, par sa substance fécondante : Le plus grand, parmi les biens qu’il produit, est la création des Anges solaires. L’un d’eux m’est apparu clairement sous ma tente et dans mon palais pour m’annoncer mes destins, et c’est lui qui est le Génie de l’Empire. Il était pâle et faible avant que l’on ne m’eût nommé Auguste ; il est grand et puissant aujourd’hui. Je l’ai vu, il m’a parlé, et jamais ses prédictions n’ont failli. Je les ai annoncées, on les a vues s’accomplir au jour marqué. Que le sourire que je vois errer sur tes lèvres en ce moment interprète ces récits comme des visions mystiques, je le comprends et je le pardonne. Mais je déclare que, lors même que ce ne seraient là que visions nocturnes et rêveries extatiques, je ne les croirais pas moins venues du ciel pour me récompenser de quelques vertus dont j’aurai pu donner l’exemple. Cette vue certaine que j’ai obtenue à force de sacrifices, d’études théurgiques et théologiques, de prières et d’adorations exaltées, m’a conduit à connaître et enseigner la vraie

  1. Ἀχράυλον. (Note de Vigny.)