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d’une façon assez imprécise, au commandement allemand. Le 15 au matin, le général d’Alvensleben confia au général Hartmann un détachement de toutes armes (6 bataillons d’infanterie, 8 escadrons, 3 batteries dont 1 à cheval), avec mission de se porter sur Vendôme et d’attaquer l’ennemi en flanc là où il le rencontrerait. L’intention du haut commandement était de ne livrer bataille que le 16 ; aussi, le chef du détachement avait-il reçu l’ordre d’éviter de se laisser entraîner à un combat sérieux. Alvensleben n’avait, paraît-il, pas grande confiance dans le général Hartmann, « qui, déjà en 1866, s’était promené sous les lauriers sans en cueillir une feuille[1] », aussi lui adjoignit-il le major de Kretschman avec des pouvoirs très étendus. Le général Hartmann, trop heureux, à ce que raconte Kretschman, de se reposer sur son adjoint, lui laissa l’entière direction du combat qui eut, d’ailleurs, une issue heureuse et entraina comme conséquence l’occupation de Vendôme. Hartmann n’hésita pas, bien entendu, à s’attribuer tout l’honneur de la victoire ; ce sans-gêne vexa profondément le major de Kretschman[2].

Après les combats sur le Loir, le prince Frédéric-Charles tient ses troupes concentrées autour d’Orléans ; elles étaient épuisées, car elles avaient aussi eu cruellement à souffrir des rigueurs de la température. La IIe armée allemande ne reprend son mouvement vers l’ouest que le 4 janvier 1871.

Kretschman, à cette époque, n’espère pas encore la paix. La chute de Paris ne doit pas, à son avis, changer grand’chose aux affaires, car Gambetta n’a rien à perdre ; plus il reste au pouvoir, plus il acquiert de popularité. Kretschman considère la convocation d’une Assemblée nationale comme nécessaire ; elle fera connaître si elle accepte définitivement la République et si elle est décidée à continuer la guerre ou à faire la paix :

Il faudrait que cette Assemblée nationale fût installée dans des conditions analogues à celles de la prison des Moabites : tous les prisonniers entendent et voient le prédicateur, mais ils ne se voient pas entre eux. Quand six Français sont ensemble, il y en a toujours un qui surenchérit sur les autres en phrases emphatiques ; quand ils

  1. Lettre 123, Mer, 17 décembre.
  2. Ibid.