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leurs candélabres, et des souffles doux et légers flottèrent dans l’air.

En ce mois de juin, qui est le mois insidieux et troublant, Louise inspira de nouvelles passions. Quelques-unes ne furent que d’un jour, une autre se montra plus sérieuse : un tout jeune homme, le fils d’un notaire très riche, très répandu, dont l’hôtel était proche de la demeure de la jeune fille, écrivit des lettres d’une exaltation qui touchait à la folie ; enfin sa famille, avertie, l’envoya en Écosse pêcher le saumon.

Comme l’année précédente, Louise devait prendre ses vacances en août. On avait retenu le petit chalet d’Arcachon, mais elle ne ferait qu’y passer, ayant promis presque tout son temps à Fernand.

Les affaires auxquelles il était mêlé entraient désormais dans une phase singulièrement émouvante et dramatique.

Depuis plus d’un an, un groupe de financiers avait établi un consortium qui, sous le nom de Société des Métaux, procédait à l’acquisition et à la vente du cuivre. La haute banque, la haute industrie, les noms les plus qualifiés, assuraient leur concours à ce grand syndicat, auquel un puissant établissement de crédit prêtait l’appui de ses capitaux.

L’accaparement des valeurs cuprifères, mines et métaux, les lança à des hauteurs vertigineuses, où elles apparurent étincelantes comme des montagnes d’or. Dès sa fondation, la maison Epstein était entrée dans la Société des Métaux et Fernand avait pris à son compte une part considérable.

Il connut alors des jours de fièvre et d’ivresse, où, en une course éperdue, il saisissait, réalisait enfin ce rêve de richesse et d’orgueil dont fut hanté sa jeunesse.

Dans l’appartement de la rue d’Anjou, qui ne servait plus maintenant qu’à leurs rencontres, il arrivait auprès de Louise, haletant, brûlant, ayant l’air de sortir d’une forge, et les bras blancs de son amie lui étaient des sources de fraîcheur où il s’apaisait.

Un jour, il vint après s’être fait attendre longtemps ; harassé, il se laissa tomber sur le divan.

— Approche, Louise, — dit-il, — et tends ta jupe.

Puis il prit à poignées, comme des feuilles sèches, les billets de banque qui bourraient ses poches.