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À LA MÉMOIRE
DE

CHARLES GUÉRIN[1]


Ton nom si cher, ton nom qui sera glorieux.
Je l’ai, par un soin grave et superstitieux,
Inscrit à la première page de mon livre,
Poète dont l’oreille est close pour jamais
À la cadence qui nous berce et nous enivre…
Ces vers simples et douloureux, tu les aimais,

  1. Les délicats n’auront pas oublié les vers que publia dans cette revue, en 1902 et 1903, un jeune poète, Albert Thomas. Le 22 janvier 1904, il nous écrivait : « J’ai entrepris un grand ouvrage : le Poème du Désir et du Regret… J’ai tenté ce que ne tentent pas la plupart des poètes mes contemporains, une œuvre d’haleine un peu longue, un tout. Le tout n’est pas complet ; mais il le sera, sans doute, au printemps… » Le 17 mai de la même année : « Je crains bien maintenant de ne pouvoir terminer mon œuvre avant l’automne… » Le 31 janvier 1905 : « J’espère finir au prochain printemps le Poème du Désir et du Regret… » Le 9 juin : « Je n’ai pas encore achevé… »

    Il l’a pourtant achevée, cette tâche où il avait mis tant de soins et tant d’espoirs, quand meurt, le 17 mars 1907, l’auteur du Cœur solitaire et du Semeur de Cendres, son ami Charles Guérin. Il improvise alors, pour la placer au fronton de son ouvrage, la dédicace harmonieuse qu’on va lire. Et lui-même, à peine deux mois plus tard, le 18 mai 1907, il est frappé, comme si la mort voulait reconnaître et consacrer la sincérité du poète.

    Le Poème du Désir et du Regret paraîtra bientôt en librairie. Nous tenons à honneur de publier aujourd’hui cette dédicace doublement émouvante.