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l’œuvre poétique de madame de noailles

créé un nouveau lyrisme intérieur, et d’avoir trouvé pour le traduire des expressions en partie nouvelles. Et, de même que j’ai tenté d’établir la suite des émotions qui lui sont propres, on dresserait sans peine le catalogue des mots. Cette impression est si certaine, qu’en ouvrant l’un quelconque de ses recueils, l’un quelconque de ses poèmes, elle saisit le lecteur non prévenu, et qu’elle subsiste et domine encore après l’étude la plus minutieuse. Le bonheur ne fut donné qu’à peu de poètes, d’annexer quelque chose de nouveau au répertoire sensible et à l’assortiment verbal du lyrisme. Madame de Noailles a été digne de ce bonheur. Elle a étendu les limites de l’empire poétique. Elle a conquis des espaces neufs, encore un peu désertiques, semble-t-il, comme les terres trop récemment découvertes, mais où elle est bien elle, bien chez elle, et où pour longtemps, en dépit des imitateurs, elle est destinée à régner seule.

léon blum