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DARWIN

Lamarck, dès le début du XIXe siècle, avait enseigné que les espèces aujourd’hui vivantes descendent d’espèces différentes ayant vécu antérieurement et dont la plupart ont disparu ; il avait même énoncé deux principes admirables au moyen desquels on pouvait comprendre simplement le mécanisme de l’évolution progressive des êtres. Une pléïade de savants illustres avait adopté la théorie de Lamarck et, de l’autre côté du Rhin, Gœthe applaudissait aux efforts de la jeune école transformiste. Mais le moment n’était pas venu ; la preuve du transformisme ne pouvait pas encore être donnée d’une manière assez frappante : l’autorité de Cuvier étouffa dans le germe cette nouveauté dangereuse et l’enterra si bien qu’on put la croire définitivement éliminée de la science. C’est en 1859 seulement que le livre de Darwin la fit sortir du tombeau ; elle eut une renaissance si brillante que l’on oublia facilement les efforts des Lamarck et des Saint-Hilaire et que l’on considéra la théorie nouvelle comme fille de Darwin ; cependant l’illustre naturaliste anglais n’en était que le père adoptif, mais un père adoptif capable de donner, pour toujours, à une enfant moralement abandonnée, droit de cité dans le domaine scientifique.

Il y a dans l’œuvre de Darwin deux parties très distinctes,