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XII

L’HOMME INVISIBLE SE FACHE


Il est inévitable que, arrivé à ce point, le récit s’interrompe de nouveau, pour une certaine raison très pénible que l’on saura tout à l’heure.

Tandis que cela se passait dans le salon, tandis que M. Huxter guettait M. Marvel fumant sa pipe contre la grille de la cour, M. Henfrey et M. Hall, dans le bar, continuaient à discuter le seul sujet possible ce jour-là, à Iping.

Soudain on entendit un coup violent contre la porte du salon, un cri perçant, puis plus rien.

— Hé là-bas ! fit Teddy Henfrey.

— Hé là-bas ! fit-on aussi derrière le comptoir.

M. Hall rangea tout, d’une main lente, mais sûre.

— Il y a quelque chose ! dit-il en quittant le comptoir pour se diriger vers le salon.

Teddy et lui s’approchèrent ensemble de la porte, attentifs, les yeux écarquillés.

— Il y a quelque chose ! reprit Hall.

Et Henfrey fit un signe d’acquiescement.

De désagréables bouffées d’une odeur chimique vinrent jusqu’à eux, puis le bruit indistinct d’une conversation très rapide, à voix très basse.

— Dites donc, vous n’avez besoin de rien ? » demanda Hall en frappant à la porte.

Les chuchotements cessèrent ; il y eut un moment de silence, puis encore des chuchotements, puis encore un cri : « Non, non, vous ne ferez pas ça !… » Alors on entendit des mouvements, une chaise renversée, une courte lutte. Puis, de nouveau le silence.

— Que diable !… s’écria Henfrey entre ses dents.

— Vous n’avez besoin de rien ? demanda encore Hall, d’une voix plus forte.

Le pasteur répondit, d’une voix curieusement saccadée :