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les stations et les moments divers du culte. Ces hymnes étaient sans doute en grec et reproduisaient toute la série de la prosodie liturgique. Après le président, chacun chante à son tour, et tous reprennent en chœur les dernières paroles de l’hymne et les refrains.

Quand tous ont chanté leur hymne, les jeunes servants apportent la table du festin sacré. Il ne s’y trouve aucun mets sanglant : rien que du pain, du sel, de l’hysope pour les gourmets. Le vin n’y figure pas ; on ne sert que de l’eau pure, attiédie pour les vieillards obligés à des précautions. Le pain est fermenté, pour que nulle confusion ne soit possible avec les pains azymes, dits de proposition, qui figurent sur la table dans le vestibule du temple. Ces derniers pains sont destinés aux prêtres, et les laïques doivent s’en abstenir, pour reconnaître le privilège du sacerdoce. Philon, en effet, est loin de supposer que l’ascétisme de ses thérapeutes supprime le culte de Jérusalem, ou les égale aux prêtres. Chez les esséniens, la tendance à se passer des prêtres et à substituer les rites de la secte au culte officiel, surtout aux sacrifices sanglants, est tout à fait sensible. Philon ne veut pas que ses solitaires commettent la même faute. La supériorité du culte de Jérusalem est hautement reconnue.

Après le repas a lieu la veillée sacrée[1]. Tous se lèvent et se groupent au milieu de la salle, de façon à former deux chœurs, celui des hommes et celui des femmes. On choisit pour conduire chacun de ces chœurs la personne la plus respectée et la plus exercée dans la musique. Une danse sacrée s’engage, accompagnée d’hymnes chantés en partie, avec des antiphonies et des répons. Des gestes marquent les cadences diverses de ces chants alternants.

Ils dansent ainsi au milieu de saints transports, tantôt marchant, tantôt s’arrêtant, tantôt tournant sur eux-mêmes, selon la loi de la strophe et de l’antistrophe. Lorsque chacun des deux chœurs séparément s’est rassasié de ce plaisir, ivres du vin de l’amour divin, comme il arrive dans les mystères de Bacchus, ils se mêlent, les deux chœurs n’en font plus qu’un, à l’imitation de celui qui fut jadis formé sur les bords de la Mer Rouge, sous la conduite de

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