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l’imagination populaire, et en même temps quelques témoignages de plus sur le rôle que les femmes jouaient à cette époque.

Thécla, en se voyant condamnée, n’implora d’autre grâce que de rester pure de tout outrage jusqu’à la mort. Alors le juge demanda s’il y avait quelque femme qui voulût la recevoir ; une riche veuve, nommée Trisina, et qui venait de perdre sa fille, s’offrit à la garder, et elle la traita comme son enfant. Voici que pendant la nuit la fille de Trisina apparut à sa mère, et lui dit : Ma mère, traitez comme si c’était moi Thécla la servante du Christ, et demandez-lui de prier pour moi. Trisina alla trouver Thécla en pleurant, et lui dit : « Ma fille m’est apparue, qui m’ordonne de vous traiter comme mon enfant, et de vous demander de prier Dieu pour elle. Thécla alors se mit à prier : Mon Dieu, seigneur du ciel et de la terre, accordez à sa fille le repos et la vie éternelle, je vous en conjure ; et pendant cette prière Trisina s’écriait, tout en larmes O jugement injuste ! ô crime ! une pareille femme être condamnée aux bêtes !

Au jour marqué, le matin les soldats vinrent à la maison de Trisina et dirent : Le peuple attend, remettez-nous la coupable ; mais Trisina se mit à pleurer et à se lamenter. Il n’y a donc personne qui puisse me secourir : je ne suis qu’une malheureuse veuve, plus d’époux pour me défendre, plus de fille pour me consoler : ô Dieu de Thécla, Dieu de ma fille, défends ta servante. Cependant les soldats emmenaient Thécla ; Trisina la suivait en disant : Hélas ! hélas ! j’ai mené ma fille au tombeau, et voici que je mène Thécla pour être exposée aux bêtes. !

Il y avait dans le Cirque un grand bruit : on entendait les hurlemens des bêtes féroces et les clameurs du peuple qui criait : Amenez la coupable ! Mais les femmes poussaient des sanglots. O affreux spectacle ! affreux jugement ! Cette ville périra par ses injustices ! condamnez-nous, tuez-nous toutes !

Thécla était au milieu du cirque, nue et n’ayant gardé qu’une ceinture. Tout à coup s’élance une lionne, mais en voyant Thécla, elle s’apaise et vient se coucher à ses pieds qu’elle lèche doucement. Les femmes jettent des cris de joie. Un ours s’avance