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LITTÉRATURE ÉTRANGÈRE.

et en Italie ? Supposerons-nous que cette similarité provient des limites étroites de l’invention humaine, et que les mêmes espèces de fictions s’offrent à l’imagination de différens auteurs de pays éloignés, comme les mêmes espèces de plantes se trouvent dans différens climats, sans qu’il y ait aucune possibilité qu’elles aient été transplantées de l’un à l’autre ? Ou devons-nous plutôt les faire dériver de la même source, en remontant jusqu’à cette époque où le genre humain ne formait qu’une seule grande famille ? De même que les philologues reconnaissent, dans les divers dialectes, les fragmens épars d’une langue générale, les antiquaires peuvent-ils reconnaître, dans les contrées les plus opposées du globe, les traces de ce qui fut originairement une tradition commune ? Sans nous arrêter à cette discussion, nous remarquerons d’une manière générale que ces recueils sont d’utiles documens, non-seulement pour l’histoire d’une nation en particulier, mais encore pour celle de toutes les nations collectivement. Il se mêle, en général, quelques vérités à toutes les fables et à toutes les exagérations des légendes orales, qui viennent fréquemment confirmer ou réfuter les récits incomplets de quelque vieille chronique. Fréquemment encore la légende populaire, en prêtant des traits caractéristiques et un intérêt de localité aux incidens qu’elle rappelle, donne la vie et l’âme à la narration froide et aride qui ne rapporte que le fait sans les particularités par lesquelles il devient mémorable ou intéressant.

C’est cependant sous un autre point de vue que nous désirons considérer ces recueils de traditions populaires, en étudiant la manière dont elles emploient le merveilleux et le surnaturel comme composition. Convenons d’abord que celui-là serait désappointé qui lirait un volumineux recueil d’histoires de revenans, de fantômes et de prodiges, avec l’espoir de ressentir ce premier frisson de la peur que produit le merveilleux. Autant vaudrait avoir recours pour rire à un recueil de bons mots. Une longue suite de récits, fondés sur le même motif d’intérêt, ne peut qu’épuiser bientôt la sensation qu’ils éveillent ; c’est ainsi que, dans une grande galerie de tableaux, le luxe éclatant des couleurs éblouit l’œil au point de le rendre moins apte à discerner le mérite particulier de chaque