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LA REVUE DE PARIS

voir, avant tout, une conception anthropocentrique de l’univers.

Entre la philosophie biologique et la philosophie sociale, dont la création est due pour une si large part, au génie français, vient se placer un ordre de recherches qui, lui aussi, appartient surtout au xixe siècle : nous voulons parler de la psychologie. Ce n’est pas à dire qu’il n’y eût eu déjà, particulièrement en France, en Angleterre et en Écosse, des psychologues pénétrants ; mais l’observation intérieure, laissée à elle même et réduite à l’étude des phénomènes normaux, avait difficilement accès à certaines régions de l’esprit, notamment au « subconscient ». À la méthode habituelle d’observation intérieure le xixe siècle en a adjoint deux autres : d’un côté, l’ensemble des procédés de mensuration dont on fait usage dans les laboratoires, et, d’autre part, la méthode qu’on pourrait appeler clinique, celle qui consiste à recueillir des observations de malades et même à provoquer des phénomènes morbides (intoxication, hypnotisme, etc.). De ces deux méthodes, la première a été pratiquée surtout en Allemagne ; quoiqu’elle ne soit pas négligeable, elle est loin d’avoir donné ce qu’on attendait d’elle[1]. La seconde, au contraire, a déjà fourni des résultats importants, et elle en laisse entrevoir d’autres, plus considérables encore. Or cette dernière psychologie, cultivée aujourd’hui dans bien des pays, est une science d’origine française, qui est restée éminemment française. Préparée par les aliénistes français de la première moitié du xixe siècle, elle s’est constituée d’une manière définitive avec Moreau de Tours, et elle n’a pas cessé, depuis, d’être représentée en France par des maîtres, soit qu’ils fussent venus de la pathologie à la psychologie, soit que ce fussent des psychologues attirés vers la pathologie mentale. Il nous suffira de citer les noms de Charcot, de Ribot, de Pierre Janet et de Georges Dumas.

  1. Elle a eu en France des représentants remarquables ; citons en particulier Alfred Binet.