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Il n’y aura aucune entrave pour nous arrêter. Nos frontières iront des Pyrénées à l’Atlas, de l’Atlas au Sahara, du Sahara à l’Océan. Et de l’autre côté des flots, — car l’Atlantique doit être notre Mer Intérieure — se trouvera l’autre Espagne, celle des Amazones, du Plata et du Popocatépelct.

Les Ibéro-Berbères de l’Espagne, du Portugal, de l’Amérique, du Maroc et du reste de l’Afrique du Nord — en un puissant empire qui rappellera celui de l’Atlantide — renoueront les liens rompus de la race commune et, continuant la glorieuse tradition historiques constitueront un facteur décisif pour le progrès de l’humanité dans l’avenir.


Assurément les partisans de Tanger espagnol étayent leurs arguments sur certains faits d’ordre social ou économique, comme le chiffre important de la population espagnole à Tanger, ou comme la situation géographique de la ville qui semble tourner le dos à l’Afrique pour regarder l’Espagne. Toutefois il nous semble qu’il entre dans les raisonnements de certains éléments intransigeants espagnols moins de raisons pratiques que de chauvinisme inquiet et que précisément ce chauvinisme ne nous est guère favorable. L’Espagne à Tanger, nous dit-on, c’est l’Espagne assurant son indépendance ? Nous ne sachons pas que l’indépendance espagnole puisse être le moins du monde menacée et nous ne voyons pas en quoi la possession de Tanger pourrait être nécessaire à la sécurité du royaume ? La présence de l’Angleterre à Gibraltar, sur le sol même de la péninsule ibérique, nous offrirait à ce titre, s’il en était besoin, toutes les garanties désirables !

Existe-t-il parallèlement chez nous un parti nationaliste qui réclame bruyamment « Tanger français » ? Certainement non. Sans doute serait-il inexact de dire que, lorsque l’accord franco-espagnol du 23 novembre 1912 fut connu à Tanger, une profonde et douloureuse émotion ne s’empara point de tous ceux — et ils étaient nombreux — qui s’attendaient à voir Tanger comprise dans la zone soumise au protectorat de la République. Il n’y avait pas là seulement qu’une question de sentiment ou de vraisemblance ; il y avait encore une question de logique.

En 1909 le commerce français à Tanger (importation et exportations réunies) tenait le premier rang avec un