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tants après il partait à cheval suivi d’un seul écuyer et s’élançait sur les traces du fugitif.

Il s’était imaginé le rejoindre facilement ; mais il s’aperçut bientôt que la tâche n’était point aisée. Les passants, auxquels il s’adressait, souvent n’avaient rien vu ou rien remarqué, et leurs renseignements étaient si vagues que le prince s’égarait en d’inutiles poursuites. Il commençait à désespérer quand un hasard le mit enfin sur la bonne voie. Il interrogea un vieux paysan qui travaillait au bord du chemin.

— J’ai bien vu passer deux cavaliers, répondit le bonhomme, il y en avait un blond tout jeune, et qui chantait en passant le pont.

— Quelle chanson, demanda le prince ?

— Ma foi, une drôle de chanson… Il disait comme ça :

« Pont, pont, joli pont,
« Tu m’as passée pucelle,
« Tu me repasses encore pucelle. »

Le prince en savait assez. Il récompensa royalement le paysan ébahi et poursuivit rapidement sa route.

Cependant la Reine n’avait pas vu le départ de son fils sans un peu d’inquiétude. Elle redoutait un coup de tête et s’empressa de faire part au Roi de tous ces événements. Celui-ci l’engagea à se rendre en personne chez le marquis de Chapolorys où se trouvait sans nul doute le mot de l’énigme.

Elle partit donc en toute diligence et pressa si bien les postillons qu’elle arriva au but de son voyage plusieurs heures avant son fils.

Isabelle racontait pour la dixième fois ses aventures à son père, quand le vieux Bertrand, tout effaré, vint annoncer l’arrivée de la reine. Le marquis se précipita à sa rencontre. Elle l’accueillit en le félicitant d’avoir regagné la faveur du Roi et, sans révéler le motif de son voyage, lui exprima le désir de connaître sa famille.

Arthémise et Oriane aussitôt appelées se présentèrent avec empressement. La Reine leur dit quelques mots de bienvenue, puis se tournant vers son hôte : — Veuillez faire venir aussi votre fils Robert, il est parti sans prendre congé de nous et se prétendant rappelé par un père mourant ; or je vois avec plaisir qu’un