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FRANZ CUMONT

preuves indirectes établissent que le taurobole a été célébré en Occident non seulement par le clergé de la Grande Mère phrygienne, mais aussi par celui de cette Bellone, que le dictateur Sylla avait transportée de Comane de Cappadoce à Rome. Les hastiferi participent à sa célébration dans le second culte, comme les dendrophori dans le premier[1]. L’existence de ce rite commun n’a rien qui doive nous surprendre, car, sous l’Empire, les deux divinités asiatiques ont souvent été rapprochées et leurs cultes, dont les orgies cruelles offrent de remarquables analogies, paraissent s’être parfois confondus[2]. La liturgie de l’un a donc pu faire plus d’un emprunt à celle de l’autre. La question est de savoir laquelle des deux déesses, celle de Pessinonte ou celle de Comane, a été l’inspiratrice de sa compagne.

Or des raisons très sérieuses empêchent d’admettre que le taurobole ait été introduit en Italie par les sectateurs phrygiens de Cybèle et d’Attis. Pour ne point répéter ici des arguments que nous avons développés ailleurs[3], nous nous bornerons à rappeler que le plus ancien taurobole qui nous soit connu, celui que mentionne une inscription de Pouzzoles de l’an 134 ap. J.-C., a été administré par un prêtre non de la Magna mater mais de la Venus Caelestis[4]. À Bénévent, la déesse à laquelle sont consacrés les autels tauroboliques prend le nom tout à fait inusité

  1. CIL, XII, 1744 ; XIII, 1751, 1752. Cagnat, Année épigr., 1892, n. 18.
  2. CIL, IX, 3146, une statue de Bellone est restaurée par une prêtresse de la Magna mater. Inversement, VI, 490, un prêtre de Bellone fait une dédicace à la Mater deum. À Ostie (XIV, 69) une image de Virtus (se. Bellona-Virtus) est offerte aux dendrophores de la Grande Mère. Cf. aussi CIL, VIII, 7956-8 ; Juvénal, VI, 512 : Bellonae Matrisque deum chorus intrat. — Les membres des deux clergés se nomment fanatici, cf. la note au CIL, VI, 490 et Marquardt-Wissowa, op. c., p. 76, n. 4.
  3. Revue archéol., t. XII, 1888, p. 132 s.
  4. CIL, X, 1596.