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cipales villes de province ? Il y aurait là, je crois, matière à une petite étude statistique et comparative d’ethnographie musicale qui pourrait être curieuse. À tout hasard, voici le menu officiel de nos festins lyriques. J’en respecte l’ordre, ayant accoutumé de respecter ce que je ne comprends pas…

Répertoire projeté

Ouvrage n’ayant jamais été joués à Bordeaux : la Walkyrie, le Jongleur de Nore-Dame, le Tasse, d’Eugène d’Harcourt ; le Médecin malgré lui, Gounod ; Bianca-Torella, opéra en cinq actes, d’Armand Sylvestre, musique de Mme D. de Fontmagne ; l’Amour Médecin, Poise ; Comédie à Compiègne, opéra-comique en un acte, d’Édouard Noël, musique de Charles Malo.

Ballets nouveaux : Mimosa, de M. Justin Clérice ; Cigale, deux actes, de J. Massenet.

Reprises : Thamyris (J. Nouguès), Lohengrin (Wagner), Louise (G. Charpentier), la Muette de Portici (Auber), Martha (Flotow), la Reine de Chypre (Halévy), les Contes d’Hoffmann (Offenbach), Le Pré aux Clercs (Hérold), le Domino noir (Auber), Don Pasquale (Donizetti), l’Ombre (Flotow), les Diamants de la couronne (Auber), Richard Cœur de Lion (Grétry), Werther (J. Massenet), le Farfadet (A. Adam), les Rendez-vous bourgeois (Nicolo), le Mariage aux Lanternes (Offenbach), Maître Pathelin (Bazin), Aïda (Verdi).

Ballets : Coppélia, Sylvia (Léo Delibes), Perle Reine, Nuit de Noël.

A. L.

BIBLIOGRAPHIE

Léon Reuchsel : l’Art pianistique. »

Nous nous en voudrions de ne pas signaler à nos lecteurs l’apparition récente d’une plaquette de M. Léon Reuchsel, intitulée l’Art pianistique. C’est un poème didactique en trois chants où l’auteur a codifié gravement en de pompeux alexandrins, à la manière des sous-Boileau du xviiie siècle, les règles de l’Art du piano. N’était la situation importante de l’auteur de ces vers, sa réputation et sa gravité professionnelles, les titres et les distinctions dont il a été honoré et les décorations qu’il a reçues, on pourrait croire à une plaisanterie un peu longue, peut-être, mais assez spirituelle, du doyen des organistes lyonnais. Il n’en est pourtant rien et ce poème, dont nous donnons ci-dessous quelques extraits savoureux, a été écrit avec le plus grand sérieux et sans nulle intention plaisante. Cette même plaquette renferme quelques autres poèmes musicaux du même genre mais de moindre envergure : la République des doigts, Podas okus, etc…

Le piano se compose (aujourd’hui qui l’ignore ?)
De cordes que renferme une caisse sonore,
Et qu’un petit marteau, mû par l’impulsion
Des touches du clavier, met en vibration.

Aux cordes, ce marteau donne un choc identique
au choc que produirait une balle élastique ;
Et selon les élans que le doigt lui transmet,
Leur son est doux et fort, ou sec comme un hoquet.

 
 

Le piano doux, puissant, symphonique, est en somme
Le plus riche instrument sorti des mains de l’homme.

 
 

Aussi bien, gardez-vous de toute fausse note
Qui souille votre jeu, comme un habit la crotte.
Si l’on veut par le feu d’un discours éblouir
On ne va pas l’éteindre en y jetant un cuir.

 
 

À pétrit le clavier comme on pétrit des mottes
Vous produirez du son sans émouvoir les notes.

 
 

L’œuvre puissant de Bach, tel un lourd coffre-fort,
Demande pour s’ouvrir un vigoureux effort
Mais, dans ses larges flancs, quel dépôt de science !
Ah ! les fugue de Bach !…
Heureux qui les pourrait toutes savoir par cœur,
Ou pour le moins ces deux : ut mineur, ut majeur.
La première est construite à trois voix, trois parties,
Et l’esprit y pétille en fines réparties…
L’autre, avec quatre voix, est d’un ton plus austère
Et ne s’applique pas à de simples mortels.
Elle semble frémir du pas des Immortels,
Quand leur grave cortège, élite consacrée,
Va faire à l’Institut sa solennelle entrée.

 
 

Dire que dédaignant ces beautés sans pareilles,
Fontenelle boucha ses séniles oreilles,
Et s’écria : « Sonate, hélas ! que me veux-tu ? »
Comme un enfant naïf dirait : « Turlututu »

 
 

Mais, laissant de Mozart le gracieux Eden,
Dans son fort affrontons le géant Beethoven.
C’est la sonate aussi dont il choisit le moule
Pour nous livrer son âme, et la sonate coule,
Selon qu’en son cœur s’ouvre ou se ferme le ciel
Comme un fleuve d’amour, comme un torrent de fiel.

Henry Cergyl : De l’Artifice à la Sincérité dans l’Art musical.

Sous ce titre, un de nos jeunes confrères vient de publier en une élégante plaquette (Rey, éditeur) une intéressante étude où est notée, avec le plus grand soin et d’une façon très personnelle, l’évolution de l’Art musical et principalement de l’Art lyrique tendant de plus en plus à la sincérité et à la vérité de l’expression.