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D I A L O G V EI I.

vies, ce qu’ils doyuent auoir de plus cher en ce monde. Surquoy ils ſe ramenteuoyent l’vn à l’autre ce que Nancé capitaine des gardes du tyran, fit par ſon commandement en la iournee de la trahiſon, aux gentilshommes couchez en l’antichambre du Roy de Nauarre : leſquels, comme tu ſcay, il fit tuer, le tyran les regardãt d’vne feneſ‍tre, à la porte du Louure, apres les auoir tous deſarmez de leurs eſpees, & dagues, & pluſieurs autres exemples des anciens, & modernes tyrans qui en ont vſé tout de meſmes.
Et ſur tout ils ſe reſouuenoyent, comme d’auertiſ‍ſemens treſnotables, de ce Bordereau de memoires qui fut enuoyé, comme tu ſcay, au defunc‍t Amiral, vn peu auant les noces tragiques de la ſœur du tyran : lequel bordereau, tous eux diſoyent vouloir apprendre par cœur, pour ne l’oublier à iamais : ayant comme ils diſoyent le meſpris d’iceluy eſ‍té cauſe de la ruine & des miſeres que nous ſouffrons tous auiourd’huy.
L’hi. Voila de bonnes gens, & bien reſolus. Dieu les vueille fortifier, & maintenir en leur ſainc‍t propos. Il vaut mieux eſ‍tre ſage tard, que de ne l’eſ‍tre iamais : & ne le pouuant eſ‍tre aux deſpens d’autruy : il vaut mieux l’eſ‍tre à ſes deſpens : voire, aux deſpens de ſes freres : (quoy que le prix ſoit par trop cher) que de ne l’eſ‍tre point du tout, ny à quelque prix que ce ſoit : ſe ſouuenant qu’ils ont affaire à des ennemis, qui ſe ſont touſiours plustoſ‍t ſeruis de noſ‍tre ſimplicité, pour nous nuire, que des moyens qu’ils euſ‍ſent.