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D I A L O G V EI I.

En Angleterre les Parlemens, qui ont meſme puiſ‍ſance qu’auoyent les eſ‍tats en France, ont ſouuent condamné leurs Rois.
Cela eſ‍t hors de toute doute que ceux qui ont la puiſ‍ſance de deſlier, ont auſsi pouuoir de lier.
Et partant és lieux où ceſ‍t ordre eſ‍t eſ‍tably, qu’il y en a quelques vns qui ſeruent de bride aux Rois, & aux loix de ſeure garde : ie dis que ceux là ſans faillir peuuent & doiuent reſiſ‍ter aux iniques ou prophanes commandemens des Rois. Et ne peuuent ceux-là laiſ‍ſer la royauté & legitime gouuernement degenerer en tyrannie ſans commettre vne manifeſ‍te trahiſon enuers le peuple : qui a eſleu tels eſ‍tats principalement à celle fin, qu’ils empeſchent la tyrannie. Que ſi de malheur elle y ſuruient, (comme nous la voyons par nos pechez arriuee à ſon comble, diſpoſant des biens & des corps, de l’honneur & de l’ame à ſon gré) c’eſ‍t aux ſuiets priuez de recourir au remede vers les eſ‍tats : eſ‍tant choſe toute aſ‍ſeuree, que ces trois eſ‍tats ſont comme ſouuerains magiſ‍trats par deſ‍ſus le Roy en ceſ‍t endroit, quoy qu’ils ſoyent priuez & au deſ‍ſous du Roy pour vn regard ordinaire.
Que ſi ce droit là des eſ‍tats vient à deſcheoir & à ſe perdre ? Ie te reſpõs, & fort bien ce me ſemble : que les Rois qui ont ſi ſouuent en leur bouche, qu’on ne preſcrit rien contre eux, nous enſeignent auſsi de dire, qu’il n’y a point de preſcriptiõ contre les droits du peuple & des eſ‍tats. Et que la loy ciuile de laquelle nous vſons, qui a la raisõ

pour ſon ame, nous enſeigne & apprẽt, qu’vn poſ-

ſeſſeur