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écrit tout au plus pendant le temps qu’il met à l’écrire (i). Car le Français compose des tableaux, l’Allemand raconte ce qu’il a vu, ce qu’il a senti, sa pauvre vie de génie méconnu. Et puis, Gautier peut travailler librement, en toute tranquillité, et il en résulte que la composition et le métier de ses contes sont parfaits ; Hoffmann chassé de partout, toujours sans le sou, sans joie et sans moyens d’existence, maintes fois forcé d’écrire sur un coin de table dans un cabaret très sale, plein de bruit et de fumées, manque souvent de ces qualités. Son œuvre brûlante de ses propres douleurs et de ses malédictions est plus vivante, celle de Gautier est plus ordonnée, plus finie. Si enfin chez Hoffmann, à cause de cette bataille continuelle avec les hommes et les difficultés de la vie, nous trouvons en abondance une ironie touchante et aiguisée comme les cailloux dont on a semé sa route, (i)M. Bergerat (op. c/7.,p. 1G9) raconte qu’un jour après l’apparition de Spirite il lui demanda s’il croyait au magnétisme : < Maienfin, lui dis-je, vous qui croyez à tout et vous qui avez trente-sept religions, avez-vous aussi celle-ci ? »

— « Non, je n’y crois plus, fit-il, mais j’y crus en écrivant ce livre.