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Le bas de soie, mon voisin, se mit alors à ricaner.

— Caleçon, tu es tout neuf, mais tu ne vivras pas longtemps.

— Pourquoi ça ? répondis-je à l’insolent.

— Regarde, regarde donc, malheureux ! Crois-tu pouvoir contenir sans accident ce postérieur pareil à deux fois le dôme de Sainte-Sophie ?

Je devinai que ce bas avait voyagé et ne répondis point. Mais l’inquiétude naquit en ma nouvelle âme. J’étais certes au désespoir de me découvrir, après avoir été le contenu, une sorte de trop petit contenant. Surtout je ne voulais pas mourir, même caleçon, tout de suite !

— Allons ! Je n’attends plus. Tant pis pour le vidame. Ce sera le tour du baron…

Ainsi s’exprimait l’impatiente beauté. Et elle commença de s’habiller.

De plus près, je ne pus qu’admirer mieux encore tout le détail de ses charmes.

Enfin, vint le tragique moment. Elle me prit, me leva à bout de bras et fit jouer la lumière sur ma soie.

— Il est joli, ce petit-là. Je vais le rendre heureux…

Et elle me fit vêtir ses grâces les plus harmonieuses, dont, il faut l’avouer, j’eus un peu de mal à faire le tour sans éclater.

Par bonheur, ma soie de bonne qualité se tenait un peu, et j’eus le bonheur étant juste, d’être suffisante…

Ah ! quels doux moments je passai ainsi, constituant une sorte de seconde prison, presque aussi étroite que la peau de chair, à celle qui allait et venait maintenant par la chambre en me permettant de me trouver belle sous ma nouvelle forme.

Elle se parfuma partout exquisement, et j’étais assez proche d’elle pour n’en rien perdre. Comme je regrettais pourtant l’époque où, être humain, j’avais dix doigts que j’eusse pu, cette fois, si savamment utiliser ! Par