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— Guéris-moi, sorcière, toi qui possèdes des secrets.

Elle se mit à rire :

— Oui, je le puis, mais il faut recourir à Satan, car seul il est qualifié.

Je ne croyais ni à Dieu, ni au diable, pour sauver les femme adultères. Je plaisantai donc Gipsy-la-Rousse.

— Hé, que ce soit par l’intervention du Cornu ou par celle de Mahomet, que me chaut ! Dis-moi, tout de suite, magicienne, comment guérir ?

— Commence par faire tes dévotions au maître des Ténèbres.

— Il n’existe pas, voyons. Sois sérieuse, Gipsy |

— Comment, il n’existe pas ! Maudite sois-tu de nier l’existence de mon maître !

Je m’esclaffai alors, de tout mon cœur. Mais soudain la scène changea. Le diable devait écouter notre entretien. Il fut vexé de ce que je lui refusais les attributs de la vie, et d’un coup, il apparut.

Figure-toi un âne énorme, avec un groin de cochon, des pattes de rhinocéros, des oreilles de King-Charles, une queue verte longue de six pieds, qui faisait le tour trois fois de son ventre et une voix de mêlé-cassis qui me causa une peur atroce.

— Tu doutes de moi, femme, dit-il caverneusement, eh bien ! tu seras châtiée pendant trois cents ans.

Je commençais à ne plus être rassurée et me sentis trembler. Il reprit :

— Tu as peur, misérable, mais c’est trop tard. Tes paroles impies sont inscrites au grand livre des malédictions. Tu vas en porter le poids longtemps.

Il jetait le feu par les naseaux, le nombril et les oreilles, je me sentis accablée. Sa voix épouvantable se fit encore entendre.

— Tu seras changée treize fois de forme et ne te réincarneras dans une femme belle, heureuse et sage qu’après