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vit ses coussins un peu bousculés et la marquise au lieu d’être assise fut insensiblement étendue…

Hélas, trois fois hélas ! le malheur approchait à grands pas. Le vidame, qui pourtant m’avait si respectueusement admiré un moment plus tôt ne se contint plus. Il voulut voir de plus près les grâces cachées de son adorée. Pour cela, il m’empoigna d’une main brutale. Nous étions, les formes de ma maîtresse et moi, si étroitement unis que je résistai, autant par affection pour elles que par la force des choses, et le malheur naquit… Je me déchirai d’un coup du haut en bas… Avec un cri d’agonie, mon âme s’envola et je ne vis pas la suite. La première réincarnation était terminée…


iii


Ce fut, je le reconnais sans honte, un pénible réveil… Qu’étais-je devenue, seigneur ? Hélas, le diable m’ayant laissé la connaissance des choses, je dus me l’avouer in petto, j’avais encore descendu dans la hiérarchie des objets intimes. Hier caleçon, soit ! On touche la chair et on fait presque corps avec elle. Et quelle chair ? Celle qui, de l’être humain, possède toutes les grâces, et toutes les sensibilités, celle où la volupté s’épanouit, comme une rose, celle enfin, et pour peu qu’on anoblisse notre corps, dont seul le titre de princesse pourrait désigner les mérites. Les pieds seraient alors barons, et les mains baronnes, les mollets vidames, les cuisses comtesses, les hanches marquises avec les bras, les seins ducs, les épaules et la tête, de petite valeur pouvant, par protection, être toutefois nobles sans titres : écuyers, comme on disait jadis… La principauté serait, par conséquent, réservée à ce que vêt le caleçon. Mais me voir devenue, je rougis de honte à le dire, un modeste instrument propre à… C’est difficile