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LA GLOIRE DU COMACCHIO

Allons, c’est fini. J’ai toujours rêvé de mourir aux bras d’une statue, comme Pétrarque le front sur un livre. Voici le moment. »

Le Juif sursauta.

— « Hein ? » fit-il.

— « J’oubliais ! » reprit Cesare avec un triste sourire. « Mes dettes ! Il faut que je les paye ! Eh bien, Tubal, rassure-toi. Je vivrai donc pour les payer. »

— « Et comment les payerez-vous ? » demanda l’usurier. « Si demain soir je n’ai pas mes quatorze cent soixante ducats, outre vos ennuis d’époux et d’artiste, mon pauvre Messer, vous pourriez, savez-vous, connaître ceux de… la prison… »

Cesare, démonté, fut pris d’un frémissement :

— « Que dis-tu ? Que dites-vous, Tubal ? Moi ? La prison ?… Vous riez ?… Vous ne répondez pas ?… Oh ! j’aperçois que vous aviez un dessein caché… »

— « Mais non, mais non… »

— « Vous m’accorderez bien un délai ? Je travaillerai ! Je vais faire des portraits de bourgeois… Non ?… »