Page:Renard - Coquecigrues, 1893.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le vieil homme inoffensif souriait au régiment attendu. Parfois il répétait à sa femme :

— Nous logerons sans doute une dizaine de soldats. Prépare une soupe à la crème pour vingt. Ils mangeront bien double.

— Mais, répondait sa femme prudente, j’ai encore un reste de haricots rouges.

— Je te dis de leur préparer une soupe à la crème pour vingt, et tu leur prêteras nos cuillers de ruolz, tu m’entends, non celles d’étain.

Il avait encore eu la prévenance de disposer toutes ses lignes contre le mur. Le crin renouvelé, l’hameçon neuf, elles attendaient les amateurs, auxquels il n’aurait plus qu’à indiquer les bons endroits.


II


On ne lui donna pas de soldats.

Parce qu’il pêchait les plus gros poissons du pays, il attribua cette offense à la jalousie