Page:Renard - Bucoliques, 1905.djvu/39

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
31
BUCOLIQUES

peine visible, et murmure : « Bonsoir ! »

Et il tâche de bien suivre le milieu de l’allée, de peur d’écraser une fraise.

C’est l’heure où le coucou chante avec sa voix de poterie brute.

Demain matin, Philippe se lèvera encore plus tôt que d’ordinaire, il travaillera avec repentir, taciturne et le nez bas, comme pour enterrer l’odeur de vin restée à son haleine.


XII


Le soir, sa soupe mangée chez lui, dans l’obscurité, Philippe vient souvent respirer le frais à côté de moi. Il apporte sa chaise, s’installe à califourchon, sort ses pieds lourds de fatigue et les met sur ses sabots, à l’air. Il bourre à moitié sa pipe et la tend à son petit garçon, Joseph, qui court l’allumer lui-même au feu de notre cuisine et qui tire les premières bouffées. C’est ainsi que le petit Joseph s’apprend à