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de tous, malgré la surprise que son christianisme oriental et la bizarrerie de son esprit devaient exciter. Comme Papias, il faisait, au milieu des rapides transformations de l’Église, l’effet d’un « homme ancien », d’une sorte de survivant de l’âge apostolique[1].

Une cause matérielle contribuait beaucoup à la prééminence que toutes les Églises reconnaissaient à l’Église de Rome. Cette Église était extrêmement riche ; ses biens, habilement administrés, servaient de fonds de secours et de propagande aux autres Églises. Les confesseurs condamnés aux mines recevaient d’elle un subside[2]. Le trésor commun du christianisme était en quelque sorte à Rome. La collecte du dimanche, pratique constante dans l’Église romaine, était déjà probablement établie. Un merveilleux esprit de direction animait cette petite communauté, où la Judée, la Grèce et le Latium semblaient avoir confondu, en vue d’un prodigieux avenir, leurs dons les plus divers. Pendant que le monothéisme juif fournissait la base inébranlable de la formation nouvelle, que la Grèce continuait par le gnosticisme

  1. Ἀρχαῖός τε ἀνὴρ καὶ ἀποστολικός. Étienne Gobar, l. c. Cf. saint Jérôme, l. c.
  2. Denys de Corinthe, dans Eus., IV, xxiii, 9-10 ; notez la réflexion d’Eusèbe. Comp. Denys d’Alexandrie, dans Eus., VII, v, 2 ; saint Basile, Epist., 70 (220).