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nues pour chrétiennes furent arrêtées, conduites au forum[1] par le tribun et par les duumvirs de la cité, interrogées devant le peuple. Tous s’avouèrent chrétiens. Le légat impérial pro prætore était absent ; les inculpés, en l’attendant, subirent les souffrances d’une rude prison.

Le légat impérial étant arrivé, le procès commença. La question préalable fut appliquée avec une extrême cruauté. Le jeune et noble Vettius Épagathus, qui avait échappé jusque-là aux rigueurs dont avaient souffert ses coreligionnaires, n’y put tenir. Il se présenta au tribunal et demanda à défendre les accusés, à montrer du moins qu’ils ne méritaient pas l’accusation d’athéisme et d’impiété. Un cri effroyable s’éleva. Que des gens des bas quartiers, des Phrygiens, des Asiates, fussent adonnés à des superstitions perverses, cela paraissait tout simple ; mais qu’un homme considérable, un habitant de la ville haute, un noble du pays se fît l’avocat de pareilles folies, voilà ce qui semblait tout à fait insupportable. Le légat impérial repoussa durement la juste requête de Vettius : « Et

  1. Le forum était sur le plateau de Fourvières. Les atroces scènes qui vont suivre eurent lieu sans doute au palais du gouvernement, qui était situé à l’endroit qu’on appelle l’Antiquaille, sur la pente de Fourvières. La tradition ecclésiastique est ici d’accord avec les indications scientifiques.