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d’Isaïe et d’Antara, du pays où l’on pleurait Thammuz, où l’on adorait Jéhova, où apparurent le mosaïsme et l’islamisme, où prêcha Jésus !

(89) De là l’aversion ou la défiance qu’il est de bon goût de professer en France contre les littératures de l’Orient, aversion qui tient sans doute à la mauvaise critique avec laquelle on a trop souvent traité ces littératures, mais plus encore à nos façons trop exclusivement littéraires et trop peu scientifiques. « On a beau faire, dit M. Sainte-Beuve, nous n’aimons en France à sortir de l’horizon hellénique qu’à bon escient. » À la bonne heure ; mais, devant des méthodes offrant toutes les garanties, pourquoi ces défiances incurables ? Dugald Stewart, dans sa Philosophie de l’esprit humain (1827) croit encore que le sanskrit est un mauvais jargon composé à plaisir de grec et de latin.

(90) Voltaire ne faisait d’ailleurs que suivre les traces des apologistes. Ceux-ci prenaient la Bible comme une œuvre absolue, en dehors du temps et de l’espace ; Voltaire la critique comme il eût fait un livre du xviiie siècle, et, de ce point de vue, il y trouve bien entendu des absurdités.

(91) De là le pédantisme de toute prétention classique. Il faut laisser chaque siècle se créer sa forme et son expression originale. La littérature va dévorant ses formes à mesure qu’elle les épuise ; elle doit toujours être contemporaine à la nation. M. Guizot fait observer avec raison que la vraie littérature du ve siècle et du vie siècle, ce ne sont pas les pâles essais des derniers rhéteurs des écoles romaines, c’est le travail populaire de la légende chrétienne.

(92) Discours de M. Burnouf, à la séance des cinq académies, le 25 octobre 1848.

(93) Le grand progrès que l’histoire littéraire a fait de nos jours a été de porter l’attention principale sur les origines et les décadences. Ce qui nous préoccupe le plus, c’est ce à quoi Laharpe ne pensait pas.

(94) Verhandlungen der Versammlungen deutscher Philologen und schulmänner, Bonn 1841. — Voir un discours de M. Creuzer sur le même sujet, au congrès de Mannheim, 1839.

(95) Dans les écrits anciens, ce qui nous intéresse le plus est précisément ce à quoi les contemporains ne songeaient pas particularités de mœurs, traits historiques, faits de linguistique, etc.

(96) C’est un usage en Bretagne de renfermer les têtes de morts dans une boite de bois en forme de petite chapelle, au-devant de laquelle est