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Le monde croulerait, qu’il faudrait philosopher encore, et j’ai la confiance que si jamais notre planète est victime d’un nouveau cataclysme, à ce moment redoutable, il se trouvera encore des âmes d’hommes qui, au milieu du bouleversement et du chaos, auront une pensée désintéressée et scientifique, et qui, oubliant leur mort prochaine, discuteront le phénomène, et chercheront à en tirer des conséquences pour le système général des choses (173).


XXII


Je demande pardon au lecteur pour mille aperçus partiellement exagérés qu’il ne manquera pas de découvrir dans ce qui précède, et je le supplie de juger ce livre, non par une page isolée, mais par l’esprit général. Un esprit ne peut s’exprimer que par l’esquisse successive de points de vue divers, dont chacun n’est vrai que dans l’ensemble. Une page est nécessairement fausse car elle ne dit qu’une chose, et la vérité n’est que le compromis entre une infinité de choses (174). Or ce que j’ai voulu inculquer avant tout en ce livre, c’est la foi à la raison, la foi à la nature humaine. « Je voudrais qu’il servît à combattre l’espèce d’affaissement moral qui est la maladie de la génération nouvelle ; qu’il pût ramener dans le droit chemin de la vie quelqu’une de ces âmes énervées qui se plaignent de manquer de foi, qui ne savent où se prendre et vont cherchant partout sans le rencontrer nulle part un objet de culte et de dévouement. Pourquoi se dire avec tant d’amertume que dans le monde constitué comme il