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espérances sur la fatigue et la dépression intellectuelle qu’amènent les grandes souffrances, ne s’imaginent pas que la génération qui entre dans la vie de la pensée est à eux ! Nous saurons maintenir la tradition de l’esprit moderne et contre ceux qui veulent ramener le passé, et contre ceux qui prétendent substituer à notre civilisation vivante et multiple je ne sais quelle société architecturale et pétrifiée, comme celle des siècles où l’on bâtit les pyramides.

Ce n’est point une pensée banale, Monsieur, qui me porte à vous adresser cet essai. C’est devant vous que je l’ai médité. Dans mes défaillances intérieures, toutes les fois que mon idéal scientifique a semblé s’obscurcir, en pensant à vous j’ai vu se dissiper tous les nuages, vous avez été la réponse à tous mes doutes. C’est votre image que j’ai eue sans cesse devant les yeux, quand j’ai cherché à exprimer l’idéal élevé où la vie est conçue non comme un rôle et une intrigue, mais comme une chose sérieuse et vraie. En écoutant vos leçons sur la plus belle des langues et des littératures du monde primitif, j’ai rencontré la réalisation de ce qu’auparavant je n’avais fait que rêver : la science devenant la philosophie, et les plus hauts résultats sortant de la plus scrupuleuse analyse des détails.

C’est à cette preuve vivante que je voudrais convier tous ceux que je n’aurai pu convaincre de ma