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moi aussi. Puis ils me barbotent parce qu’ils ont happé une sogne ; mais moi j’ai eu bon d’avoir peur.

Le gros Baiwir, lui — c’est le goherrlî (bourrelier) d’ici tout près — il a la peau des mains tellement dure et noire de horpike (poix), que les marrons ne sont jamais trop chauds pour lui. Il les prend tout bolands et il en mange plus que sa part. Quand il n’est pas là, mon oncle dit que c’est un grossir homme. Mais Baiwir raconte toujours des histoires avec les voleurs, quand il vient à la sise ; il en sait toujours des nouvelles parce que les messagers et les charrons vont boire une goutte chez lui pour aller acheter des chesseutes.

Cette fois-ci Baiwir a raconté celle avec un homme qu’on appelle Gigot et qui s’habille à femme pour rattendre les gens sur les routes et leur prendre leurs cennes.

Encore l’autre samedi Gigot a arrêté un maçon qui venait de lever son argent et qui remontait vers Micheroux en halcotant parce qu’il avait bu. Et Gigot, qui avait mis une cotte de moutonne, une marinière et une gâmette, faisait d’abord semblant d’être soûl aussi. Puis le maçon l’avait appelé sôleye, puis avait voulu danser avec, et puis l’avait pris à cabasse pour aller encore boire une goutte ensemble « Au repos du Thier ».

Mais quand ils avaient arrivé à la « Vîle voye », près des Plopes, Gigot avait tiré une brique ou une demi-brique hors de sa poche et il avait maqué le maçon sur la tête pour