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MES SOUVENIRS

« Avant de fermer ma lettre, j’ai une prière à vous adresser à genoux, et vous savez qu’en ne m’y voit pas souvent. Voici la chose : on fait beaucoup d’arrestations en province sur des dénonciations anonymes. Ces accusés sont jugés par des commissions spéciales, vous savez ce que cela signifie. On a arrêté le comte Adolphe Spada, de Pesaro, mon intime ami depuis quinze ans. Il est à Ferneo sous la griffe d’un certain Collemasi, processante[1] de la pire espèce. J’affirme sur l’honneur que Spada est un parfait honnête homme dont je réponds, et il est impliqué dans un procès d’assassinat politique datant de sept ou huit ans. Dieu sait quel est son accusateur. Je sais, par contre, qu’au temps de la République il a fait beaucoup de bien à Pesaro et empêché des désordres. La réaction lui a ôté sa place de conservateur des hypothèques. Des malheurs de famille l’ont réduit presque à l’indigence. Je lui avais trouvé de l’emploi en Piémont pendant que j’étais ministre ; il a refusé, disant qu’il avait des dettes et ne voulait pas se dérober à ses créanciers. Voilà l’homme qu’on traite d’assassin et qui est peut-être exposé à recevoir la bastonnade. Mon but serait de trouver le moyen de le faire exiler. Voyez ce qu’on est réduit à demander pour ses amis. Une fois exilé, il viendrait à Turin, et il aurait

  1. Faiseur de procès.