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MES SOUVENIRS

Il avait été d’abord décidé que le mariage se ferait par procuration et qu’on attendrait le mois de mars, époque à laquelle la princesse Clotilde devait avoir accompli sa seizième année. Mais l’Empereur, averti du triste accueil fait à Turin à ce projet d’union, en hâta la célébration sans tenir compte des convenances et des usages, craignant que cette violente opposition fît manquer une alliance à laquelle il attachait le plus grand prix.

La princesse Mathilde elle-même n’avait rien su ; elle se montra froissée de ce que son frère ne l’avait jamais entretenue de ses projets. Elle n’en avait eu connaissance qu’au dernier moment.

La princesse Clotilde avait un empire extraordinaire sur elle-même. Elle était peu expansive ; on lui reprochait de manquer de sensibilité, ce qui n’était pas, elle se dominait avec fermeté en toute chose, voilà tout ! Elle avait supporté avec beaucoup de fermeté et un grand sentiment religieux la mort de sa pauvre mère ; elle avait alors treize ans. Tout récemment elle venait d’être privée par une intrigue de cour de Mlle de Foresta qui l’avait élevée.

Avec son esprit très fin et très juste, elle se sentait supérieure à son entourage. Aussi, lorsqu’elle fut fiancée, elle interrompit sèchement une des dames de la cour qui commençait à lui parler du prince,