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CHAPITRE DIXIÈME

faisans, de lièvres et de lapins. Le temps était froid, mais très beau, très sec, avec du soleil. Le soir, il y eut grande représentation à l’Opéra, un ballet suivant le goût des habitants de Turin. Rosita y dansait Jovita. La salle était comble. Les boulevards étaient illuminés de lanternes chinoises de toutes les couleurs. Lord Byron, chambellan de la reine d’Angleterre, était venu à Paris, porteur d’une lettre de sa souveraine pour complimenter Victor-Emmanuel au sujet de sa prochaine arrivée à Londres.

Le mardi 27 novembre, en sortant du ministère des affaires étrangères, je rencontrai par hasard le comte de Cavour, et nous avons fait route ensemble jusqu’au Club impérial. Il fut fort aimable pour moi, et je m’efforçai de rester poli ; mais je ne pouvais vaincre un sentiment de grande froideur. Ce que je savais de ses procédés à l’égard de Massimo d’Azeglio m’avait révolté. Le soir, je dînai avec lui chez la princesse Mathilde. J’avais été reçu dans la matinée par Victor-Emmanuel, qui m’accueillit fort bien ; comme à Turin il m’embrassa en me voyant, sans que notre conversation sortit des généralités ; il me dit qu’il était enchanté d’être à Paris, qu’il m’avait recommandé particulièrement à l’Empereur et qu’il espérait me voir un jour ministre de France en Italie. « C’est là que je vous attends sous peu », ajouta-t-il.