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MES SOUVENIRS

Dans une audience que M. Drouyn de Lhuys me donna le 17 août, il me pria de lui lire la dépêche de M. de Castelbajac, avec lequel au point de vue politique il ne s’entendait pas très bien. Il donnait, en écoutant cette lecture, des signes véritables d’impatience. Il était évident que la ministre ne partageait pas la confiance de l’ambassadeur de France à Saint-Pétersbourg en l’empereur Nicolas.

J’avais laissé à Turin de trop précieuses relations pour ne pas saisir l’occasion d’y revenir. Je profitai de mon congé à la fin d’août 1853 pour aller y passer quelques semaines. J’y trouvai la situation politique bien changée. Le comte de Cavour s’était rapproché de Rattazzi et avait définitivement évincé Massimo d’Azeglio.

« Me voilà libre, s’était écrié d’Azeglio, et je pousse le cri d’un homme qui s’est débarrassé du poids dont sa poitrine était chargée, ouf !

« J’avais accepté le gouvernail quand il était démontré que j’y pouvais manœuvrer avec plus de profit qu’un autre pour le pays. J’ai eu le bonheur de le tirer d’un bien mauvais pas et de nous sortir des écueils sans trop d’avaries. Maintenant, le navire est radoubé, et j’ose dire que les voiles peuvent flotter au vent. Je quitte mon banc de quart ; à un autre !

« Cet autre, que vous connaissez, est d’une activité