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MES SOUVENIRS

sence, j’étais placé entre le prince Kotschubey et le général commandant l’école des porte-enseigne de Pétersbourg. Ce général avait épousé une Nicolaï, dont la mère était une princesse de Broglie. Ces Nicolaï étaient devenus Russes ; l’un d’eux, parvenu au grade de général et blessé au cou pendant une des campagnes du Caucase, s’est fait chartreux et est mort en France à la Grande-Chartreuse.

Le dîner du club anglais est toujours d’une rare richesse. Le potage — l’oukha de sterlets — coûte à lui seul huit mille francs. Des toasts ont été portés à l’Empereur, à l’impératrice et à la famille impériale, à la reine d’Angleterre, à la prospérité de la Russie, au bien-être de la société. Pendant le repas, un orchestre jouait les airs les plus renommés de Meyerbeer, de Bellini, de Verdi, de Rossini et d’Auber. Mon voisin de table, le général commandant l’école des porte-enseigne, se plaignit de la mollesse avec laquelle étaient élevés les officiers russes. La discipline des écoles militaires de France, me dit-il, est beaucoup plus sévère. En Russie, les officiers qui appartiennent à des familles riches se font accompagner à l’armée par de nombreux domestiques et se font suivre par une quantité énorme de bagages ; — de là de grands inconvénients et un sensible retard dans la marche des troupes. Le courage du soldat