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MES SOUVENIRS

monde sous le nom de palais Marie. À cette époque du moins, la France n’était pas aimée en Russie, et l’empereur Nicolas n’avait aucune sympathie pour elle. Dans la presse de Pétersbourg, le prince de la Moskova était ainsi désigné : M. le prince Ney fils aîné — pour éviter de rappeler une victoire française.

La grande-duchesse Marie, que j’avais eu l’occasion de voir plusieurs fois à mon arrivée à Saint-Pétersbourg, montrait beaucoup de goût pour les arts, peignant et dessinant fort bien. C’était une femme fort agréable, mais un peu fantasque. Elle dépensait, dit-on, deux cent mille francs pour ses robes et ses chapeaux. On la rencontrait le soir en traîneau, en plein hiver, dans les rues de Pétersbourg.

Le 16 octobre 1852, peu de jours avant la mort du duc de Leuchtenberg, j’aperçus la grande-duchesse avec sa fille, âgée d’une dizaine d’années, à l’Opéra, à une représentation d’Hernani.

Devenue veuve, la grande-duchesse Marie fit un long voyage en Allemagne et de là se rendit en Angleterre, aux bains de mer de Bath. Elle avait avec elle son plus jeune enfant, né du vivant de son mari. Elle sortait accompagnée d’une nourrice qui portait des vêtements russes très éclatants. Les Anglais qui s’empressaient pour apercevoir la princesse se trom-