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CHAPITRE QUATRIÈME

mort violente. Il avait exilé une grande partie de la noblesse, son règne devenait insupportable pour tout le monde. Il avait bâti comme une forteresse le palais d’hiver, entouré de fossés remplis d’eau ; sur la porte il avait fait graver cette inscription en langue russe :

« Que le Seigneur garde ta maison pour de longs jours. »

C’est sous son règne que M. de Nesselrode, qui avait été d’abord officier, a quitté l’armée. Le régiment de cavalerie dans lequel il servait ayant mal manœuvré devant l’Empereur dans une revue, celui-ci s’emporta et envoya le régiment tout entier en exil. Au bout de trois jours de marche, on vit arriver un courrier porteur d’un ordre nouveau. C’était un oukase prononçant la dissolution du régiment et ordonnant aux officiers et soldats, incapables de bien servir, de rentrer dans leurs foyers et d’embrasser d’autres carrières.

L’empereur Paul était terrible dans ses emportements et redouté de tout le monde. Au moindre mécontentement il envoyait en Sibérie celui qui lui avait déplu. Un jour, son ministre de la guerre lui fit signer la nomination d’un officier dont le nom le frappa. C’était une erreur des bureaux : cet officier n’existait pas. Le malheur voulut que l’Empe-