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MES SOUVENIRS

plat est-il enlevé de la table que les domestiques s’en emparent et en font une répugnante curée.

L’empereur Nicolas était d’une grande simplicité personnelle, très soigneux de ses vêtements et n’aimant pas à les remplacer. Très rigoriste, il n’a jamais consenti à laisser élever une statue à l’impératrice Catherine, à cause des mauvais exemples qu’elle a donnés par l’immoralité de sa conduite. Il avait toujours dans son cabinet un grand chien du mont Saint-Bernard : « Il est laid, disait-il, mais il est fidèle, et je lui suis attaché. »

Quand un incendie éclatait à Pétersbourg, l’Empereur y accourait toujours, payant bravement de sa personne et se tenant au premier rang. Un jour qu’une poutre enflammée menaçait de s’écrouler sur lui, un pompier le saisit rudement et le fit reculer à temps. L’incendie éteint, l’Empereur voulut savoir le nom de son sauveur. Il eut du mal à le découvrir. Le brave homme, consterné de son audace, s’était fait mettre en prison, s’accusant lui-même d’avoir porté la main sur l’Empereur.

Lors de l’incendie du Grand Théâtre de Moscou, un paysan avait accompli un sauvetage des plus périlleux. L’Empereur le fit venir à Saint-Pétersbourg : « Je te remercie de ta bonne action, lui dit-il, embrasse-moi et raconte-moi comment Dieu t’a secondé. » Après