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CHAPITRE QUATRIÈME

regardant bien en face : « Me reconnais-tu, dit-il, coquin ? Pourquoi n’es tu pas à ! a caserne ? » Tous les soldats de la garnison de Saint-Pétersbourg connaissaient la voix et la figure de l’Empereur. La terreur avait dégrisé l’infortuné. « Monte sur le siège de mon drochky, lui dit Nicolas, enseigne toi-même à mon cocher où demeure ton colonel. » Le pauvre diable, plus mort que vif, s’exécuta, et l’Empereur dicta lui-même la punition qu’il dut subir.

L’Empereur étant à Pétersbourg le centre de tout, les moindres détails sur lui sont relevés avec une extrême curiosité, et les anecdotes sur son compte abondent.

Mlle Bras, ancienne actrice du Théâtre français, étant allée le trouver pour lui demander de s’intéresser à une représentation donnée à son bénéfice, la conversation tomba sur les manœuvres auxquelles Mlle Bras avait assisté. « Comment me trouvez-vous, lui demanda le Tzar, à la tête de mes troupes ? – Ah Sire, vous avez bien la tournure de votre emploi. » Nicolas répéta ce propos qui l’avait beaucoup diverti.

L’ancienne demoiselle d’honneur de l’impératrice Catherine, devenue dame d’honneur de la grande-duchesse Hélène, dont tout le monde à Pétersbourg connaissait le caractère vif et emporté, —  « Junon