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MES SOUVENIRS

léra éclata à Pétersbourg. Le peuple, croyant que les médecins empoisonnaient les malades par ordre du gouvernement, se révolta et massacra au marché au foin plusieurs d’entre eux. Nicolas se rendit sur-le-champ en calèche, seul avec le prince Orloff, au milieu de cette foule furieuse : « Chapeaux bas et à genoux, s’écria-t-il, et commencez par faire de suite le signe de la croix, en priant Dieu d’apaiser le fléau qui nous frappe, au lieu d’attirer sur nous son courroux par vos crimes. »

Il fut obéi. L’Empereur prit alors la parole ; il fit comprendre à cette multitude son égarement et son injustice envers les médecins qui se dévouaient pour la guérison des malades. En peu d’instants l’ordre si profondément troublé fut rétabli.

À une autre époque, l’Empereur devait, dans un de ses voyages, passer par Posen. Le gouverneur l’avertit des dangers qu’il pouvait courir et le supplia de ne pas traverser la ville. Il ne voulut rien écouter, et l’attentat prévu se produisit. Nicolas ne dut son salut qu’à la mépfise des assassins qui s’attaquèrent à la première voiture précédant la sienne. Elle était occupée par un secrétaire de chancellerie qui fut blessé.

Le caractère de l’empereur Nicolas, souvent si hautain et si absolu, était un singulier mélange d’or-