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PRÆFATIO.


domestique, et un repas entre les parens. On conservoit publiquement dans la ville du poison fait avec de la ciguë, que l’on donnoit à celui qui avoit exposé aux six cens les raisons qu’il avoit de souhaiter la mort. Si Marseille, quoique conservant toujours ses coutumes, n’a pas laissé de prendre quelque chose du génie de ses voisins, les Gaulois en revanche ont beaucoup pris d’elle : car c’est chez elle qu’ils ont puisé la politesse, l’amour des belles lettres, l'etude de la langue Grecque. Les Gaulois, dit Justin, ont appris des Marseillois à quitter leurs manieres rudes et grossieres pour en prendre de plus polies, à cultiver les terres, et à entourer les villes de murailles. Alors ils s’accoutumerent à ne plus vivre de leurs armes, mais à s'assujettir à des loix, à tailler la vigne, à planter des oliviers. Les hommes et tout ce qui servoit à leur usage acquirent un si grand lustre, qu’il sembloit, non que la Gréce fût passée dans la Gaule, mais que la Gaule eût été transferée dans la Gréce.


IX.

Des Expeditions des Gaulois.

Au tems de Tarquin l'Ancien, Ambigat roi des Celtes étant deja fort vieux, et voyant que son Roiaume étoit si peuplé qu’il pouvoit à peine le gouverner, il prit la résolution de le décharger d’une grande partie de ses habitans. Il déclara donc qu’il avoit dessein d’envoier Bellovese et Sigovese, fils de sa sœur, jeunes Princes hardis et courageux, dans les pays que les Dieux leur désigneroient par les augures ; qu’ils n’auroient qu’à prendre avec eux telle quantité d’hommes qu’ils voudroient. Le sort donna la forêt d’Hercynie à Sigovese, et l’Ita-